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Le rock progressif se déplace par bonds, aime le double dutch et trouve intéressant de participer à des compétitions de bobsleigh (pour peu qu'on lui foute la paix cinq minutes) (AppAs, 2010)

Appas : Le rock progressif se déplace par bonds, aime le double dutch et trouve intéressant de participer à des compétitions de bobsleigh

Si vous appréciez If I Could Do It All Over Again I'd Do It All Over You de Caravan ou bien Dedicated to You But You Weren't Listening de Soft Machine, et même si vous ne les aimez pas (mais ça c'est une faute de goût qu'il vous faut dûment rectifier), vous devriez savourer Le rock progressif se déplace par bonds, aime le double dutch et trouve intéressant de participer à des compétitions de bobsleigh (pour peu qu'on lui foute la paix cinq minutes).

Quoique, une telle prédictibilité n'est sans doute pas du goût des quatre membres du groupe PaillaSon, cinq en comptant leur manager, qu'ils nomment Patron. Et encore, vouloir se mettre à la place desdits musiciens pour tenter d'en deviner le goût consiste déjà à courir le risque de subir leur incommensurable courroux sous la forme d'une force de frappe titanesque. Car PaillaSon, ses tribulations, ses conflits internes, ses choix esthétiques, les valises de partitions d'Edward, les concerts en des lieux atypiques pour divers publics, pas nécessairement humains, sont narrés par l'un des membres du groupe, auteur-chanteur, et l'on se rend très vite compte qu'il ne fait aucun doute, absolument aucun, que PaillaSon est le plus grand groupe de rock progressif de tous les temps, non pas par sa taille (suivez un peu, ils sont quatre, cinq avec Patron), mais par son absence de limites dans sa démarche esthétique et créative, par l'immensité de son univers lui-même en constante expansion, en constante progression au-delà l'infini.

Chroniquer Le rock progressif se déplace par bonds, aime le double dutch et trouve intéressant de participer à des compétitions de bobsleigh (pour peu qu'on lui foute la paix cinq minutes) est déjà une gageure, tant le chroniqueur s'expose, vous l'aurez sans doute remarqué, à une contamination stylistique, quand bien même celle-ci serait prétendue sans conséquences pour la santé, quand bien même les pages seraient digérées à petites doses nucléiques, autant pour savourer l'oeuvre que pour se protéger d'un glissement schizophrénique vers l'absurde par digressions successives, un procédé très en vogue dans le rock progressif justement. Las, le piège se referme déjà sur vous. Le breuvage consistera sans doute alors à relire et relire encore l'ouvrage, pour soigner le mal par le mal.

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© Eric Deshayes - neospheres.free.fr